Exclusif. 4 appartements à Dubai, deux appartements en Turquie : Beldjoud soupçonné « d’enrichissement illicite »
algeriepartplusDéc. 13, 2021Lire l'original
Le ministre de l’Intérieur, Kamel Beldjoud, l’un des piliers du clan présidentiel d’Abdelmadjid Tebboune, et l’un de ses plus fidèles collaborateurs durant ces 6 dernières années, est soupçonné « d’enrichissement illicite » et fait l’objet d’une enquête secrète menée par des services de renseignement, a pu confirmer Algérie Part au cours de ses investigations.Le nom de Beldjoud est cité dans plusieurs dossiers de passations douteuses de marchés publics dans le secteur de l’Habitat, le secteur où il avait été l’un des dirigeants les plus influents en sa qualité d’ex-secrétaire général du ministère de l’Habitat de 2016 jusqu’à 2019 avant de devenir lui-même ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville du 31 mars au 4 janvier 2020. Ces dossiers n’ont jamais pu attirer les projecteurs des juges et tribunaux algériens pour la simple raison que l’actuel Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, était lui-même le premier responsable du secteur de l’Habitat de 2001 jusqu’à 2002 et ensuite de 2012 jusqu’à…2017.
Les « dossiers » et « affaires » du secteur de l’Habitat n’ont donc jamais intéressé des juges et magistrats apeurés, craintifs et intimidés par les risques auxquels ils s’exposent si, par aventure, ils osent toucher à ce secteur « sulfureux ». Mais au sein de certains services de renseignement, des instructions ont été communiquées pour ouvrir discrètement ces dossiers et déterminer le rôle de chacun des acteurs clés du secteur de l’Habitat dans certains marchés ou gros contrats dont les conditions de conclusion n’ont jamais été déterminées.
L’ouverture de cette enquête s’explique aussi par les nombreuses informations qui sont parvenues aux services de renseignement algériens concernant la « fortune cachée » de l’actuel ministre de l’Intérieur, Kamel Beldjoud, à l’étranger. Ce dernier, en dépit de son salaire de fonctionnaire algérien limité et dérisoire quand il est converti en devises, voyageait plusieurs fois par an à Dubai et en Turquie durant les années 2016 jusqu’à 2018. Plusieurs membres de la petite famille de Kamel Beldjoud séjournaient à plusieurs reprises en Turquie durant la même période. Ces va-et-vient exigent des frais et des dépenses en devises que le salaire de Kamel Beldjoud ne sauraient couvrir ou justifier.
Derrière ces voyages nombreux se cachent en réalité un patrimoine immobilier entretenu par Kamel Beldjoud et ses proches dans le plus grand secret. L’actuel ministre de l’Intérieur a été ainsi dénoncé aux services secrets algériens comme étant propriétaire direct et indirect, à savoir à travers l’usage d’un prête-nom, de pas moins de 4 biens immobiliers à Dubai et deux autres appartements en Turquie. Une enquête a été ainsi rapidement, et secrètement, ouverte pour déterminer l’exactitude de ces informations.
En attendant les conclusions de cette enquête, plusieurs éléments factuels concordants ont démontré la proximité de Kamel Beldjoud avec plusieurs sociétés étrangères ayant remporté des marchés importants dans le secteur de l’Habitat en Algérie durant ces 4 ou 5 dernières années.
Certains de ces marchés ont été même bloqués en 2017-2018 à la suite du limogeage du mentor de Beldjoud, à savoir Abdelmadjid Tebboune qui occupait les fonctions de Premier-ministre durant l’été 2017 avant de chuter brutalement et de disparaître momentanément de la scène politique. A titre d’exemple, les autorités algériennes ont mis en échec le rapprochement du groupe public Cosider, la plus importante entreprise étatique du secteur du bâtiment et travaux publics, avec l’entreprise turque Adopen, la société de production de portes et fenêtres en aluminium et en PVC, l’une des plus importantes et prospères entreprises turques.
Adopen est considérée comme le premier fabricant de fenêtres en PVC de Turquie et elle cumule un demi-siècle de connaissances et d’expérience dans le domaine de la fabrication de fenêtres en Turquie. Cette entreprise turque devait créer une Joint-Venture (JV) avec COSIDER pour vulgariser l’utilisation du PVC dans le bâtiment algérien. Ce rapprochement a été instruit par… Kamel Beldjoud lui-même en sa qualité de secrétaire-général du ministère de l’Habitat. Le PDG de COSIDER, Lakhdar Rekhroukh, était briefé régulièrement par Kamel Beldjoud pour veiller sur le succès de cette opération économique. Adopen avait même envoyé un Jet privé à Alger pour prendre en charge le déplacement du PDG de Cosider en Turquie.
Cette générosité n’est pas fortuite ni gratuite puisque les négociations devaient aboutir à la création d’une JV avec Cosider qui devait ainsi injecter un gros montant en devises afin de financer diverses dépenses liées aux activités de cette nouvelle JV comme la facturation excessive des importations de plusieurs équipements ramenés depuis la Turquie.
Ces tractations et ces pratiques financières occultes qui auraient pu provoquer des transferts illicites de devises ont rapidement éveillé les soupçons du gouvernement algérien en septembre 2017 et ce projet fut entièrement annulé et bloqué lors d’une réunion officielle du Conseil des Participations de l’État (CPE), l’organe à travers lequel l’État algérien exerce son rôle de propriétaire des actifs confiés aux Sociétés de Gestion des participations.
L’affaire Adopen n’est qu’une affaire parmi tant d’autres dans lesquelles Kamel Beldjoud a joué un rôle controversé. Et les négociations autour de ces marchés ou contrats coïncidaient toujours avec les va-et-vient de Beldjoud en Turquie et Dubai. Simple hasard du calendrier ou… ? Pas si sur. En tout cas, une enquête officielle et sérieuse devrait s’intéresser de près à ces soupçons d’enrichissement illicite. Et le silence apeuré de la Justice algérienne est une forme de complicité qui empêche à coup sûr l’avènement de la vérité.